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mercredi 24 juillet 2013

Totnes : Petite excursion en Angleterre

Nous sommes partis avec Véro, notre fidèle monture, voir ce qui se passe un peu chez nos voisins d'outre-manche...
 
En attendant le Ferry à Dunkerque

Direction Totnes, ville connue pour être à l'origine du mouvement des villes en transition.
Le concept est simple : viser l'autonomie énergétique et alimentaire ainsi que la résilience : pouvoir être autonome en cas de forte récession, hausse du prix du pétrole, raréfaction des énergies fossiles (gaz, essence, nucléaire...), ce qui est effectivement en train d'arriver d'ici une cinquantaine d'années.


Plutôt que de décider d'être affolés par toutes ces incertitudes à l'avenir, ils prennent le contre-pied et changent la donne dès aujourd'hui : leur manière de voir les choses, de consommer, d'habiter.
On avait bien envie de voir tout ça de nos propres yeux !

Parce que nous avons le temps, nous décidons d'emprunter les petites routes.
Totnes se trouve au sud-ouest de l'île, vers Plymouth, nous longeons donc la côte sud de l'Angleterre.

Au fur et à mesure des 'miles' parcourus, nous voyons le paysage évoluer, passant de villes balnéaires charmantes serrées les unes aux autres, à des petites stations un peu plus éloignées et sauvages, et la végétation change.
Les champs et les forêts commencent à devenir plus denses, plus vallonnés ; les maisons deviennent des cottages ou des corps de fermes aux toits de chaume, et devant les habitations se dressent de curieux véhicules à quatre roues motrices, souvent très gros et imposants.

On commence à comprendre quelle genre de population peut se permettre d'habiter ces régions verdoyantes... Véro se fait de plus en plus doubler par ces engins surdimensionnés aux lumières aveuglantes.
Nous comprenons que les touristes, eux aussi, utilisent le mêmes type de véhicules, sûrement par souci de passer incognito dans la région.
Véro seule contre tous
Erica & Ian

Nous sommes accueillis à Totnes par Erica et Ian, un couple plutôt libre aux personnalités très différentes !

Erica est consultante en habitat durable, et travaille pour une association qui enseigne la construction de maisons en paille aux personnes n'ayant pas de logement.

Ian se définit comme étant un 'Interdimensionnal Wizard', soit un sorcier interdimensionnel. Touche-à-tout, il est passionné par l'électronique et les inventions.

Tandis qu'Erica est plus timide et se dévoile peu, Ian cherche à expliquer sa vision de la vie, ses trouvailles techniques et ses questions existentielles à qui veut bien l'écouter. Un de ces nombreux métiers est de faire des démonstrations d'inventions lors de festivals un peu alternatifs (type Glastonbury) . Il nous a ainsi longuement parlé du moteur Stirling, de la turbine Tesla, et fait tester son Realizer, appareil qui capte tes réactions émotives.
De longues soirées de discussions et de réflexions !

Première impression de Totnes

En arrivant à Totnes, quelque chose nous titille tous les deux.
Où sont donc les parterres de légumes ? Les vergers luxuriants ? Les maisons colorées aux portes grande ouvertes ? Les résidences d'artistes impertinentes ?
On avait peut-être un peu trop d'attentes...
Oui, car ce qu'il y a principalement à Totnes au premier coup d’œil, ce sont des maisons avec des panneaux solaires et des magasins bio et équitables.

Transition Walking Day

Le mouvement 'Villes en Transition Totnes' organise des visites tous les 15 jours pour expliquer le projet tant aux visiteurs curieux qu'aux locaux non-impliqués.
Nous sommes 8 personnes curieuses à y participer ce jour : 1 néo-zélandais vivant en Angleterre, 1 allemande, 1 chinoise vivant à San Francisco, 1 japonais et nous ! Autant dire que le concept attire des gens de toute part mais bien peu de locaux...

L'idée que nous nous faisions de ce tour était une sorte de plongeon dans le quotidien de la ville en transition : les gens qui y participent, le changement dans leurs modes de vie, discuter avec des personnes de tous les horizons, découvrir des idées écologiquement innovantes, etc.
Finalement, le petit tour s'est transformé en visite guidée de la ville et de son histoire : nous avons seulement parcouru les rues et nous sommes arrêtés de temps à autre pour écouter quelques anecdotes historiques et évoquer  les différentes actions menées par le mouvement.
Même si le contenu était intéressant, nous nous attendions à autre chose.

Ce que nous ressentons du modèle des villes en transitions ?

 

Concernant Totnes, c'est une ville touristique, enclavée dans une région (le Devon) aussi très touristique. Et quand on parle de tourisme, il faut savoir que la région attire principalement la population retraitée aisée de l'Angleterre. Dans le Devon, chaque (grande) maison a sa (grosse) voiture et personne ne sort sans son petit pull sur les épaules si on peut dire cela comme ça  !

Le mouvement 'villes en transition' veut relocaliser l'économie de la ville, et c'est vraiment l'axe majeur, ainsi que retisser du lien social entre voisins, habitants et commerçants.
Ainsi, le mouvement s'organise un peu comme un parti politique citoyen, sans étiquette, qui pousse les élus locaux à changer leur cap.

Alors oui, ça marche, il y a des panneaux solaires sur la mairie et sur beaucoup de maisons, des magasins bios, des cafés servant des pâtisseries faites maisons etc.
Mais nous nous attendions à plus de créativité, plus de spontanéité et d'idées. Beaucoup de choses sont mises en œuvre, mais il s'agit de projets dont nous avions déjà entendu parler un peu partout dans le monde, nous qui pensions nous retrouver dans le berceau de l'innovation écologique...

Quelques jours plus tard, alors que nous nous rapprochions de la mer, à 20 minutes en voiture, à Dartmouth, nous avons mieux compris la situation. Tout à coup nous nous retrouvions au Touquet (Paris Plage) !
Et en y regardant mieux, tout ce qu'il y a autour de Totnes c'est le Touquet : des gens bien apprêtés, bien bronzés comme il faut, qui louent des bateaux avec des visières sur la tête, et qui font la queue au tabac du coin pour acheter des bouteilles d'eau minérales (pas comme nous avec notre gourde remplie avec l'eau des toilettes du bar du coin)


Alors oui c'est vrai que dans ce contexte, Totnes c'est l'eldorado de l'écologiste ! Mais ça reste tout de même à nos yeux bien gentillet.

Pourquoi viser 80% d'autonomie alimentaire d'ici 2030 quand on pourrait aller bien plus vite? Oui car pour l'instant il n'y a qu'une petite dizaine de parterres de légumes dans toute la ville...
Pas de quoi organiser une soupe populaire encore.



 Et le bio et le commerce équitable ?

Ce qu'on a aussi pu remarquer pendant ce périple, c'est que les anglais sont les rois de la dénomination douteuse !
Ici, le terme et label "Organic" (bio) est en réalité peu connu et moins un critère que le "fait local".
Dans les cafés ou sur les emballages tu peux à coup sûr rencontrer l'une des appellations suivantes :

Local made! (fabrication locale)
Freshly made! (produit frais)
Fresh from farm (produit de la ferme)
Home-made! (fait maison)
Healthy! (aliment sain)
100% Natural! (100% naturel)
Wholefood! (aliment complet)
No OGM! (pas d'OGM)
No additives! (sans additifs)
No Chemicals! (sans chimie)


Mais rien ne dit que ces aliments soient bio. D'ailleurs pour la plupart, ils ne le sont pas.
Même rentrer dans un magasin bio (Organic Store) ne t'assure pas de ne trouver que des produits bio. Exemple: tu peux trouver en magasin bio la fameuse marque de chips anglaise Tyrrel's, bien qu'elle n'ait pas le label bio européen.

Suite et Fin

En partant de Totnes, nous devions rendre visite à une association qui plante des arbres en agroforesterie, mais on a ensuite appris qu'il s'agissait d'arracher des mauvaises herbes. Dans notre conception des choses qui poussent, il n'existe pas de mauvaise herbe, et nous sommes plutôt partisans des systèmes qui marchent d'eux-mêmes, sans intervention.
Nous avons donc décidé d'abréger notre petit tour en Angleterre et de rentrer tout doucement en France.

Bien que ce billet soit teinté de petites déceptions çà et là, il n'en fait pas moins une mauvaise expérience, au contraire ! Nous avons passé un très agréable moment sous le soleil anglais, à dormir dans la voiture (sous le regard ahuri des voisins, nous faisant des signaux de lampes de poche pour rentrer en contact avec nous !), à se promener dans la verdure à perte de vue !

Nous rentrons également contents de voir que nous arrivons à suivre nos envies, comme nous le voulions. Si l'envie de partir se fait sentir, nous partons, tout simplement !